Alain Duault et Eve Ruggiéri : Triste constat
En ce jeudi 3 février 2011 était diffusée sur France 5 l’émission « Un soir avec Offenbach ».
Ce type de sujet n’étant pas très courant à la télévision, j’avais donc bien pris note de ce rendez-vous et me tenais prêt à me délecter d’une émission intelligente, car en principe sur France 5, il est d’usage que l’on fouille un peu plus qu’ailleurs les sujets.
J’avais été très déçu par deux autres émissions relativement récentes produites par France Télévision qui traitaient du sujet Offenbach et je me réjouissais donc d’avance de pouvoir suivre un documentaire bien construit.
Il y a plusieurs mois, une émission signée Eve Ruggieri m’avait particulièrement affligée. Cette Dame nous avait distillé poncifs, banalités et évidences. Cette émission n’étant sans doute encore une fois qu’un prétexte pour s’afficher en compagnie de "Grands artistes" qu’elle a le bonheur de côtoyer, mais qui, s’ils sont des Stars de l’Opéra, ne sont pas forcément adaptés à l’opérette. Sociologiquement ç’était quand même intéressant car j’ai rarement vu une telle superficialité dans le traitement télévisuel de l’art lyrique, mais bon Offenbach, là dedans me direz-vous ?
Une autre émission m’avait pas mal déçu également : elle était signée Alain Duault et s’articulait autour d’un concert du 14 juillet. Cela se voulait didactique, ça laissait juste imaginer sans le faire vraiment donner à entendre que tout de même, Jacques Offenbach avait écrit d’autres oeuvres que Orphée aux enfers, La belle Hélène, La grande Duchesse, la Périchole ou enfin les contes d’Hoffmann. On avait eu encore une fois droit aux mêmes extraits, qui sont toujours proposés dès que l’on parle d’Offenbach à la télévision.
En ce 3 février 2011, Alain Duault nous a resservi la même soupe et repris son one man show médiatique en nous programmant pour la troisième fois en quelques mois les mêmes extraits des mêmes œuvres…
Heureusement, il avait fait appel à Jean Christophe Keck, un passionné d’Offenbach qui a réussi à apporter de la valeur ajoutée à cette émission qui, sans lui aurait été encore une fois une redite insipide, mettant plus en avant le présentateur que le sujet traité.
On serait en droit d’espérer que Monsieur Duault en charge d’une mission de service public se donne un minimum de mal pour être original et nous instruire. Au lieu de cela, on assiste comme d’ailleurs avec sa collègue Rugierri à un partage a minima du gâteau bien rance que représente la musique classique à la télévision.
Ils n’ont sans doute jamais assisté à une des très nombreuses œuvres en un acte du Maître de l’Opérette, car, sinon ils n’omettraient pas d’en parler. Il est vrai, pour leur défense, que l’on ne joue pas ce répertoire dans les grandes maisons où ils ont le privilège d’être invités. Mais leur métier ne consiste-t-il pas à être curieux ?
Ce portrait proposé est bien superficiel et bien incomplet, rien sur les nombreuses troupes qui en France essaient de faire découvrir les 95 autres titres du maître, qui sont à mon sens beaucoup plus importants que les grands succès dont on nous rebat les oreilles. L’âme d’Offenbach est sûrement bien plus dans ces petits ouvrages que dans ces grandes productions.
Les interprètes choisis ne sont pas non plus les représentants les plus légitimes pour représenter Offenbach. Ce sont des gens qui font partie du star système et qui sont venus faire un tour par là parce que ça redevenait à la mode ou par hasard. Leur diction pour certains est souvent exécrable et leur chant bien souvent trop lourd. Et puis, ce n’est pas avec des places à 150€ ou plus qu’on démocratise l’opérette. Félicity Lott, Nathalie Dessay ou Madame Monzon sont de grandes artistes qui ne sont pas vraiment abordables financièrement pour le commun des mortels, on ne les rencontrera jamais dans un festival l’été en train de défendre ce répertoire. De plus leur côté « Diva » ne colle pas avec la légèreté du genre.
Le plumeau du Général Boum Boum est bien sympa, mais on y a droit à chaque fois qu’on parle d’Offenbach… Au bout d’un moment ça lasse et on voudrait bien voir autre chose !
Pourquoi ne pas passer des extraits du Festival de Bruniquel dont Jean-Christophe Keck est justement un des artisans, avec des airs du Voyage dans la lune ou du Château à Toto. Pourquoi ne pas diffuser un extrait de Croquefer ou de Monsieur Choufleuri ou de Pomme d’Api ? Pourquoi ne pas parler de tous ces lieux en France où un public si nombreux se presse pour découvrir des ouvrages jubilatoires dont aucun média ne parle jamais ?
Triste constat encore une fois de voir que la mission culturelle se contente de passer une couche de vernis et n’incite pas plus le public à venir découvrir ce genre de musique divertissante.