J’ai récemment eu l’occasion de regarder un DVD réalisé par Daniel Schmid en 1987 intitulé Le baiser de Tosca.
L’action, si on peut parler ainsi, se passe à la "Casa Verdi", maison de retraite milanaise mise en service juste après la mort du "Maitre" Italien.
Longtemps financée par les droits d’auteur de Verdi cette maison continue désormais à vivre grâce à des donateurs privés qui assurent ainsi à ces vieilles gloires de théatres une retraite heureuse.
Ils sont environ 65 chanteurs, musiciens et compositeurs tous au moins octogénaires à se mouvoir dans cet espace atypique qu’est la Casa Verdi.
Alors, me direz-vous, pourquoi faire un article sur le sujet de la vieillesse sur un site comme celui-ci qui n’est pas très porteur et très vendeur ?
Tout simplement parce que c’est un rare moment d’émotion, un témoignage d’anciennes gloires de l’art Lyrique, qui bien des années après leur dernière prestation continuent encore à se mettre en scène et à vivre cette passion qu’est l’amour de la musique.
Les voix bien que fatiguées sont encore bien là et nous sommes le témoin anonyme de ce naufrage inexorable qu’est la vieillesse, mais qui est estompé à chaque instant par cette joie de vivre et cette passion qui continue à animer ces vieux artistes. Ils sont éblouissants et pathétiques en même temps.
La soprano Sara Scuderi, ancienne gloire de la Scala, est sûrement la plus exceptionnelle : sa voix est toujours là, Tosca coule dans ses veines.On la retrouve se déplaçant d’un pas mal assuré au gré des couloirs de l’institution. On sent qu’elle sera une prochaines victime de ce temps qui passe, mais elle incarne encore et toujours la joie de vivre et la jeunesse.
Les hommes aussi m’ont beaucoup impressionné : ils semblent d’une manière générale avoir gardé davantage leur voix, on y entend un ténor dans toute sa puissance, qui mobilise ce qui lui reste de forces pour rester à la hauteur.On se dit qu’il n’y arrivera pas, et puis si, il y arrive encore avec brio...
Une Mamy révise rapidement le choeur des esclaves un petit coup juste avant une réunion lyrique organisée au sein de la communauté. Une autre l’interpelle en lui demandant ce qu’elle fait et si elle a encore besoin d’apprendre ce truc, l’autre se justifie par le fait qu’il y a quarante ans qu’elle ne l’a plus chanté, et qu’elle veut être sûre d’être à la hauteur tout à l’heure.
Tout ce petit monde aujourd’hui disparu, mérite d’être découvert par l’émotion et l’humanité qu’il dégage et l’on finit inexorablement par se poser la question de savoir comment on finira soi-même. On s’identifie à ces anciens et on se dit qu’à tout perdre, une maison de retraite de ce type pourrait être un beau concept pour nos vieux jours.