C?est sur une vieille cassette audio que m?avait fait passer un ami que j?ai été initié à Michel Dens.
L?écoute de cette bande m?a fait découvrir le beau chant Français et en ce qui me concerne je considère que cet homme est l?un des plus grands barytons du siècle qui vient de s?écouler. Diction parfaite, facilité déconcertante, c?était un maitre.
Je l?ai rencontré un peu avant sa mort, son nom était dans l?annuaire, je lui ai passé un coup de fil, il m?a reçu.
Il avait 87 ans et préparait encore un concert pour l?automne suivant. Nous avons bu un verre, discuté musique, il s?est mis au piano et m?a fait vocaliser...
Il m?a dit : vous êtes ténor... !? Il s?en est suivi un débat ...
Il semble que je sois toujours baryton aujourd?hui même si j?ai l?aigü facile et je me suis toujours demandé si ce vieil homme avait ses faculté altérées ou s?il ne projetait pas sur moi un rêve qu?il n?avait jamais pu concrétiser : être ténor. Il m?avoua même que c?était son grand regret.
Il m?a proposé de revenir pour travailler, je me rappelle qu?il chantonnait l?air de Tosca "le ciel luisait d?étoiles" .Il habitait Paris, moi Bordeaux nous nous sommes quittés, je ne l?ai jamais revu. Il est décédé le 19 décembre 2000.
Le souvenir de cet homme de cinquante ans mon ainé, qui pourtant n?avait plus rien à prouver et qui semblait mélancolique de ce qu?il n?avait pas fait, me laisse encore une impression indéfinissable : un mélange d?admiration et de compassion.
Je ne suis pas un biographe et je ne vais pas tenter de vous faire un condensé de sa carrière à ma façon. J?ai retrouvé ces lignes que je vous expose ci-dessous issues du dictionnaire des chanteurs de l?Opéra de Paris par Jean Gourret, le livre est introuvable voilà donc une bonne raison de vous faire partager ce passage consacré à Michel Dens :
Michel Dens est, au théâtre comme au disque, l?une des gloires de l?école française.
Michel Dens est né à Roubaix le 22 juin 1911. Quoique destiné à exercer un métier dans la fabrication textile, il suivit l?enseignement du Conservatoire de sa ville natale. A l?issue de ses études, comme la crise sévissait dans l?industrie, il réussit a se faire engager comme second premier baryton à l?Opéra de Lille en 1934 ; puis, il se produisit à Bordeaux, à Grenoble, à Toulouse et à Marseille, où là, il accéda à une popularité qui se répandit ensuite sur l?ensemble de la province. Aussi n?éprouva-t-il aucune hâte à acquiescer aux propositions que lui adressa la R.T.L.N. C?est en 1947 qu?il parut à Paris, d?abord à l?Opéra-Comique, dans Werther : rôle d?Albert. Son timbre clair, sa mezzavoce charmeuse, son style pur et brillant, son rayonnement sympathique, tout en lui séduisit aussitôt le public.
Il fut affiché dans Le Barbier de Séville : Figaro. Carmen : Escamillo. Lakmé : Frédéric. Manon : Lescaut. Mireille : Ourrias. Les Pêcheurs de Perles : Zurga. La Tosca : Scarpia. La Bohème : Marcel. Les Noces de Jeannette : Jean. Madame Bovary Rodolphe. Paillasse : Tonio. Cavalle¬ria Rusticana : Alfio. Les Contes d?Hoffmann : Dapertutto. A chaque fois il remporta le succès.
Mais, dès cette même année 1947, il montra aussi les puissantes ressources de sa voix, au Palais Garnier. Il y chanta Rigoletto. Othello : Iago. Hérodiade : Hérode. Faust : Valentin. Thais : Athanael. Lucie de Lamermoor : Asthon. Carmen : Escamillo. Latraviata : d?Orbel.
Cependant Michel Dens, chanteur à la mode, excellent acteur, consacra une bonne part de son talent à l?opérette classique, où les emplois de jeune premier, fussent-ils écrits pour une tessiture de ténor, lui convinrent à merveille.. Ainsi tint-il l?affiche cinq années consécutives à la Gaîté Lyrique dans Le Pays du Sourire : sous les traits de Sou-Chong. Les Mousquetaires au Couvent. Les Cloches de Corneville, Rip, La Fille de Madame Angot, Véronique et bien d?autres oeuvres légères encore, lui ont valu de toucher un public immense
Grand voyageur, il n?a cessé de parcourir la province et s?est produit en Suisse, en Belgique, au Luxembourg, au Canada, en Afrique du Nord, en Allemagne et en Espagne, et il a participé à de nombreux festivals, parmi lesquels celui d?Aix-en Provence.
Phénomène par l?étendue de sa voix, qui va du sol grave de la basse au si-bémol du ténor, Michel Dens l?est aussi par la longévité d?artiste puisque, en 1982 il atteint ses 48 ans de carrière.
Voir également cet article de Jean-Claude Fournier
Ci-dessous, des extraits mp3 d?une emission de radio avec Michel Dens enregistrée il y a quelques années...