La brochure qui détaille la programmation de la saison 2007-2008 de l’Opéra de Bordeaux est tombée dans ma boîte aux lettres ce matin.
A part un Faust de Gounod qui était attendu depuis longtemps, un bal masqué de Verdi et une bohème de Puccini, côté opéra, il n’y a pas grand chose d’autre pour attirer l’amateur d’Art lyrique que je suis.
Mais bon, trois opéras de belle facture c’est déja ça, ne boudons pas notre plaisir, espérons juste que pour ces trois ouvrages auxquels j’adhère la distribution sera à la hauteur de ce qu’elle doit être, car, depuis ces dernières années, c’est un spectacle sur deux, voire sur trois qui est satisfaisant vocalement à Bordeaux.
Pour le reste, comme presque tous les ans, on a droit à notre "création contemporaine" , cette année c’est Génitrix de Tihanyi.
On se demande quelle est la finalité d’une telle programmation sinon peut-être dépenser l’argent public et se donner l’impression d’être des créateurs voire des artistes. On invite du monde, on débat et on se gargarise dans la presse complaisante de l’acte de création... en résumé, ça doit faire juste plaisir au microcosme intellectuel Bordelais du triangle d’or.
Comme tous les ans, on a aussi et c’est incontournable, notre Mozart avec Idomeneo un des rares opéras de ce compositeur pour lequel je ne prends personnellement aucun plaisir à l’écoute, mais enfin c’est estampillé Mozart sur l’étiquette, c’est donc bien... il y a des codes à l’opéra de Bordeaux sur lesquels on ne transige pas. Plutôt que de prendre le chef d’oeuvre d’un compositeur moins connu et de la même période (Cimarosa avec le mariage secret par exemple), on préfère prendre un opéra relativement lisse du génial Mozart, car forcément, c’est du Mozart.
Au programme également un Scarlatti , "La Vergine dei dolori" que je ne connais pas, je ne juge donc pas, car il y a des choses sympa chez Scarlatti ... à voir peut-être. J’espère juste que cette musique ne sera pas trop intimiste et que le public en profitera aussi un peu et que ça remplira la salle, tout comme celle de "Scènes et madrigaux" de Monteverdi qui, sur une chaîne Hi-Fi pour audiophile avec un enregistrement pris au plus près doit se laisser écouter, mais qui à mon avis n’est pas faite pour l’opéra. De plus cette programmation sent vraiment le fabriqué, histoire de proposer quelque chose, il s’agit en fait d’extraits de trois oeuvres de Monteverdi, avec trois chanteurs et 5 instrumentistes... pour moi ça tient plutôt du récital que d’une production proprement dite, mais ça fait une ligne de plus dans la programmation prévue...
Côté opérette on continue toujours avec le service minimum, cette année ce sera juste une chauve souris de johann Strauss... l’opérette est bien morte à Bordeaux. Notons que Princesse Czardas qui a été produit cette année a déçu vocalement , espérons qu’il ne faudra pas attendre dix ans pour une distribution lyrique digne de ce nom.
Vous allez me trouver bien critique, mais, je crois qu’il faut dire de temps en temps ce que l’on pense, histoire que ceux qui attribuent l’argent public sache que son utilisation est discutable et qu’en l’absence d’une presse indépendante qui joue son rôle, il y ait des voix qui s’élèvent de temps en temps pour aiguillonner et pour contester certains choix.
L’engagement dans l’opéra ce n’est pas seulement prendre le thé, "picorer, déguster" comme j’ai pu lire sur la brochure que j’ai reçu. L’amateur de lyrique a besoin de consistant, de voix, cette programmation est fade, assure le service minimum, pas de tête d’affiche comme à Toulouse, elle n’est que compromis voire de compromissions avec une nomenklatura qui est à des années lumière des souhaits du public.
Il existe une musique appelée « l’Opéra Français » qui mériterait d’être défendue et qui semble inconnue des responsables de notre institution Bordelaise. C’est dommage, Ils devraient pourtant avoir à coeur de la promouvoir...je veux bien aller leur en parler un jour, s’ils ont besoin d’être éclairé ;-).
Quand entendra-t-on des compositeurs comme Auber, Adam, Audran, Bazin, Boieldieu, David, Grétry, Halévy, Hérold, Hervé, Lecocq, Massé, Maillard, Massenet, Messager, Meyerbeer, Planquette, Rabaud, Reyer, Saint-Saëns, Terrasse, Thomas, Vasseur et bien d’autres. Ces noms là leur disent ils encore quelque chose ? Qui , sinon l’institution de référence, l’Opéra National a la responsabilité de promouvoir ce pan de la culture française qui tombe dans l’oubli ?
N’y aurait il pas un acte de création à faire connaitre ces musiciens qui trônent au fronton de nos institutions lyriques et dont il n’est jamais programmé un seul opéra ?
Présider au devenir d’une institution et tourner le dos à ce qui l’a fait briller au fil des décennies et siècles précédents, n’est pas très glorieux. La mondialisation de la pensée unique a t elle aussi envahi le monde de l’art lyrique ?
La programmation de cette année est peu fournie en titres, pourquoi si peu d’oeuvres sur une saison ? Reprenez une programmation d’il y a quarante ans, regardez le budget qui y était alloué en Francs ou en Euros constants, demandez vous pourquoi et comment les prédécesseurs des équipes actuelles arrivaient à faire plus avec moins !
Pourquoi n’il y a t-il plus de troupes locales permettant de diversifier et d’offrir un vrai choix au public, pourquoi va t on chercher ailleurs à grand frais des gens qui la plupart du temps ne sont pas meilleurs que nos artistes nationaux ?
Voilà cela fait beaucoup d’interrogations sans réponse, réconfortons nous en constatant qu’il y a encore un peu de lyrique à Bordeaux, nous ne sommes pas encore tombés complètement dans la loi du marché, les programmes se déroulent toujours à 20h00, et c’est une joie de constater que l’on ne cherche pas encore à imposer les séances à 3h30 du matin pour être synchro avec la programmation de TF1.