A l?heure ou tout le petit monde "bien pensant" se met à facebook et confère à son iphone la place centrale dans son existence, j?en arrive à prendre du recul par rapport à mes contemporains qui se donnent le sentiment d?exister par l?accumulation de symboles ostentatoires d?un modernisme éphémère.
Internet est un formidable outil de communication, mais au bout du compte ce n?est qu?un modeste éclairage sur ce que l?on accepte de bien vouloir y partager ou y mettre en exergue. Les gens que l?on y rencontre sont souvent des gens qui viennent chercher quelque chose et ce sont rarement des gens qui savent donner ou partager et c?est bien dommage, j?ai appris à me méfier des enthousiasmes de circonstance exprimés par ces "amis" dont vous pensiez qu?ils faisaient partie de votre monde mais qui ne sont en fait que des gens bien superficiels.
A l?heure de la pensée unique qu?elle soit écologique ou mediatico-politique et qui montre du doigt ceux qui pensent différemment, j?ai décidé de me mettre en berne de cette agitation stérile et de m?éloigner un peu de ce moyen de communication et de ces faux amis et de laisser les bien-pensants à leurs certitudes.
Beaucoup de gens ne vivent leur vie que par procuration au travers de celle des autres, ils pistent le moindre mouvement, le moindre frémissement et cherchent à tout savoir de vous alors que vous ne savez rien d?eux.
Pour ma part, je me suis un peu lassé de m?exposer et de donner toujours sans jamais recevoir, d?ouvrir mon âme, ma maison et ma table à des opportunistes.
Le site dont vous êtes en train de lire ces quelques lignes vit toujours, je lui donne encore une chance eu égard pour celui que j?étais et pour ne pas me renier. Peut être qu?au bout d?une longue période de délaissement il renaîtra sous une autre forme. Il exprime en tous cas une vision candide de l?approche que j?avais du monde du chant au moment ou j?ai rédigé ces lignes, c?est un témoignage d?une période révolue, j?ai compris depuis beaucoup de choses et préfère dorénavant rester plus discret.
Mon expérience de ces deux dernières années en tant que responsable d?une association m?a conforté dans l?idée que dans cet univers du lyrique comme dans celui du cyber espace, le mouton n?était pas une race en voie d?extinction et que même si on était un loup bienveillant et protecteur, on était quoiqu?on fasse un loup pour les autres. Ne pouvant me résoudre à bêler avec le gros de la troupe des suiveurs, j?ai, je crois trouvé une autre forme de sagesse consistant à laisser partir les brebis geigneuses et à mener ma barque suivant mon idée, en mesurant d?avantage mes mots, en instaurant une distance de sécurité avec les autres et en me méfiant aussi des courtisans. J?ai trouvé sur ma route beaucoup de conseilleurs mais bien peu de faiseurs.
On s?éloigne un peu du chant, mais si on considère que 99% des gens qui chantent ou qui continuent à le faire sont des frustrés de ce qu?ils n?ont pas réussi à faire ou de ce qu?ils auraient aimé faire on en revient vite a l?affligeante condition humaine et à tous ses travers qui mêlent en vrac : ego surdimensionnés, perte de repères, petites lâchetés, jalousie chronique et petits meurtres entre amis. Ca vaut pour le chant, mais ça vaut je crois pour tous les métiers artistiques, qui, s?il paraissent bien séduisants en façade sont sûrement le creuset de tout ce qui se fait de moins glorieux. Des gens bien difficiles à contrôler et à manager pour résumer qui font plus penser à des pré-ados qu?à des adultes responsables.
Pour être un véritable artiste, il ne suffit pas seulement de savoir chanter et d?avoir conscience de soi, il faut être au dessus du lot dans nombre d?autres domaine différents, savoir être, savoir vivre, savoir aimer et tolérer, ne pas avoir un coucou dans la tête, ni un poil dans la main. Force est de constater que ce n?est pas donné à tout le monde.
Simple amateur et fier de l?être, je me suis aperçu modestement que j?en savais bien plus que certains qui se prévalent d?être des professionnels et qui ne sont en fait que des ouvriers spécialisés cantonnés à interpréter toujours les mêmes ouvrages sans grand enthousiasme dans de grandes salles. A aujourd?hui, je n?ai toujours pas croisé un véritable Artiste qui me donne envie de suivre sa voie ou de le prendre comme modèle, mais je ne désespère pas, ça doit bien exister.
C?est un triste constat, mais les mots permettent parfois de fixer les ressentis. Pour ma part, j?en ai terminé avec cette introspection qui m?a permis de me remettre en question et de voir que je n?étais sûrement pas le plus coupable ni le moins méritant et que si l?on pouvait m?exprimer des reproches, ce seraient ceux qui consistent à dire que j?en ai trop fait pour les autres.
Les revers vous arrêtent ou vous permettent de rebondir encore plus fort. J?ai choisi la deuxième option, j?ai repris ma quête afin de travailler avec des gens motivés, passionnés qui sont pour la plupart des amateurs avec leurs défauts, mais surtout leurs qualités, pour voir si je peux, tel un Don Quichotte moderne arriver à atteindre cette inaccessible étoile que tant de professionnel se sont résignés à arrêter de chercher.
En terminant ces quelques lignes, j?ai bien conscience qu?elle peuvent dérouter un lecteur qui passerait pour la première fois sur ce site. Ces maux sont surtout à l?usage de quelques uns qui croient vivre dans un monde parfait, et qui peut-être se reconnaîtront. Cet univers, appelé aussi petit monde de l?Opéra, n?est qu?un monde artificiel très bisous bisous, fait de sourires et de fausses amitiés, d?intrigues, de coucheries et de lâcheté et surtout, c?est bien triste pour ceux qui l?animent : d?illusions perdues. C?est un monde ou chacun roule pour soi et ne regarde pas à côté, un monde fait de paillettes et de trompe l?oeil, un bien triste monde en vérité pour qui aurait la tentation de soulever le rideau ou de gratter un peu sous la dorure.