Cela faisait une vingtaine d’années qu’il n’y avait pas eu de Faust produit à l’Opéra de Bordeaux.
En ce début 2008, Gounod revient donc à l’honneur et c’est une bien belle production qu’il m’a été donné de voir et d’entendre au grand théâtre de Bordeaux.
Tout d’abord, saluons une mise en scène qui colle bien au livret (ce qui n’était pas le cas pour le précédent ouvrage ) de jolis costumes, un peu de pyrotechnie, de bonnes trouvailles de mise en scène , tout pour vous permettre d’écouter sereinement les voix et la musique.
Côté voix, c’était du très bon niveau, en tous cas pour la distribution que j’ai pu entendre. Méphisto (Paul Gay) grand bonhomme jouant parfaitement le rôle avec sa belle voix de basse, Faust (Woo Kyun Kim) magnifique ténor lyrique nous a fait un festival en tenant parfaitement son rôle. Marguerite était peut-être un peu en dessous des deux autres, mais la voix était quand même bien là.
Faust, ne nous le cachons pas, c’est aussi et avant tout, une succession d’airs "Tarte à la crème" connus de tous, servis parfois par une musique qui peut devenir un peu "pompier", mais qui, malgré tout, est un ouvrage incontournable que tout amateur d’opéra se doit d’avoir vu et entendu au moins une fois dans sa vie.
Le Choeur nous a fait également une belle prestation que j’ai pu apprécier tout au long de cette belle représentation qui allait crescendo jusqu’à la fin du quatrième acte.
Puisque nous sommes dans le quatrième acte, un petit clin d’oeil en passant au jeune organiste Martin Tembremande , tout juste 21 ans, fils d’un de mes collègues de travail et qui faisait pour l’occasion ses débuts à l’Opéra. Il nous a superbement servi ce moment si particulier de la chapelle où l’osmose avec le Choeur était empreinte de ce mysticisme religieux qui marque bien là, la patte de Gounod. En bref, un joli moment de musique.
Nous arrivons maintenant à ce que je considère être une verrue dans cet opéra, je veux dire le ballet du cinquième acte.
Il n’existait pas à la création de l’opéra en 1859 et il a été rajouté par Gounod une dizaine d’années après... drôle d’idée.
Imaginez : vous écoutez l’ouvrage depuis trois heures et demi, l’action est à son paroxisme et tout d’un coup, c’est la fête chez Méphisto et tout s’arrête avec ce ballet vient nous plomber l’action pendant près d’une demie-heure. Va pour la première scène qui est même agréable dans le contexte, mais au bout d’une demie-heure, vous pensez qu’il commence à se faire tard, que les chaises sont dures et que vous aimeriez bien qu’on abrège un peu car vous êtes venu voir un opéra et pas un ballet.
Si ces scènes de ballet font manifestement plaisir aux danseurs, personnellement je dois dire que ça me laisse complètement froid et surtout que ça n’a rien à voir avec l’intrigue. Ca casse complètement le rythme de cet opéra, comme une sorte de "super bonus" ou une pause pub interminable ajoutée à un DVD et que l’on serait obligé de regarder pour arriver à la fin du film.
La première idée est souvent la bonne et Monsieur Gounod aurait bien été inspiré d’en rester là et de ne rien changer à son premier jet. L’air de Valentin qui lui aussi avait été rajouté trois ou quatre ans après, s’inscrit quand même bien mieux dans l’action que ce fichu ballet.
Au bout d’un long supplice, la fin de l’opéra finit par arriver et ça redevient superbe dès que Méphisto se remet à chanter. J’ai quitté le lieu à minuit et quart en pestant quand même après Gounod (il faut bien un prétexte pour ronchonner) et après le choix de la version retenue par l’Opéra de Bordeaux...
Décidément cette incursion dans le monde de la danse qui arrive comme un cheveu sur la soupe m’est restée en travers ... j’ai bien failli m’endormir ... O Catherine ma mie ...
En résumé, si comme moi, vous n’êtes pas un accroc de la balayette, tenez jusqu’à la fin, car à part cet intermède, il est quand même super sympa cet Opéra. Le final avec Marguerite qui appelle les anges à accueillir son âme au sein des cieux est un superbe moment lyrique et ça serait dommage de ne pas suivre cette fin en forme d’apothéose.